Le niveau des élèves en français

Enquêtes PISA et PIRLS, des études mondiales menées à grande échelle

À travers les dernières enquêtes, notamment PISA et PIRLS, une tendance claire se dessine : les performances en compréhension de l’écrit et en expression écrite connaissent une stagnation, voire une régression. Que nous apprennent précisément ces études sur l’évolution du niveau des élèves en français au fil des ans ?

Les résultats de l’enquête PISA 2022 publiés dans un rapport en 2023

L’évaluation PISA (Programme International pour le Suivi des Acquis des élèves) est une étude mondiale visant à mesurer les compétences scolaires à l’échelle internationale. Ce programme est mis en place par l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Économiques). Il évalue tous les trois ans les acquis des adolescents âgés de 15 ans.

Les tests se concentrent sur trois domaines fondamentaux de l’enseignement : la lecture, les sciences et les mathématiques. Cette initiative permet ainsi de comparer les systèmes éducatifs des différents pays participants et d’observer leur évolution au fil du temps. C’est la lecture, et donc la compréhension de l’écrit en français, qui nous intéresse ici.

Une baisse inquiétante de la compréhension de l’écrit des adolescents de France

L’enquête PISA 2022 a mis en évidence un recul global des performances des élèves français de 15 ans, notamment en compréhension de l’écrit. Ils ont obtenu un score moyen de 474, soit légèrement en dessous de la moyenne des pays de l’OCDE (476). La baisse est de 19 points par rapport à la dernière enquête, réalisée en 2018. La France se positionne ainsi loin derrière L’Irlande, le Japon et la Corée du Sud, qui sont en tête du classement.

Là où, en 2000, les élèves les plus en difficulté représentaient 15 % des effectifs, ils sont 27 % en 2022. Et la part des élèves les plus performants diminue légèrement, passant de 9 % à 7 %.

Une accentuation des inégalités scolaires et sociales observée par cette évaluation PISA

Cette tendance s’inscrit dans un déclin général observé au sein des pays de l’OCDE, en partie attribué aux perturbations liées à la crise sanitaire. Cependant, en France, l’enquête PISA montre que cette baisse s’accompagne d’un fort impact des inégalités sociales : les élèves issus de milieux défavorisés obtiennent des scores significativement plus bas que leurs camarades favorisés, renforçant ainsi l’écart entre les élèves. Cette différence en fonction des origines sociales se vérifie, par ailleurs, dans les diverses évaluations nationales.

PIRLS 2021 : évaluation des compétences en littératie des élèves de CM1

PIRLS (Progress in International Reading Literacy Study – Programme International de Recherche en Lecture Scolaire) est une évaluation internationale menée tous les 5 ans depuis 2001 pour mesurer les compétences en compréhension de l’écrit des élèves de CM1 (donc autour de 10 ans). La France y participe depuis sa création. Depuis 2001, cinq sessions ont eu lieu. La dernière s’est échelonnée d’octobre 2020 à juin 2022.

Lors de cette évaluation, les élèves disposent de 45 minutes pour travailler deux textes : un texte littéraire, et un texte documentaire. Ils ont une longueur moyenne de 700 mots.

Une stabilisation du niveau de lecture des élèves de CM1

Lors de cette session, la France a obtenu un score de 514 points, au-dessus de la moyenne internationale (500) mais en-dessous de la moyenne européenne (527). Elle est toutefois le seul pays de l’Union européenne à avoir stabilisé ses résultats, alors que la majorité des autres pays européens ont connu une baisse significative de 11 points en moyenne par rapport à 2016.

Bien que les résultats français restent inférieurs à la moyenne européenne, cette stabilisation est encourageante. Elle suggère que les mesures pédagogiques mises en place par l’Éducation nationale commencent un peu à porter leurs fruits. Il faudra observer les variations sur un temps plus long.

Des évaluations nationales qui confirment ces tendances

Les évaluations nationales constituent un baromètre essentiel qui permet de mesurer le niveau des élèves en français. Qu’il s’agisse des traditionnelles dictées de CM2 ou des nouvelles évaluations standardisées déployées en 2024 sur l’ensemble des niveaux du primaire, ces outils permettent de dresser un état des lieux précis des compétences des élèves.

La dictée de CM2

Les performances en orthographe des élèves de CM2 ont fortement chuté depuis 1987. En effet, la même dictée a été soumise aux élèves en 1987, 2007, 2015 et 2021. Le résultat est sans appel. Le nombre moyen d’erreurs est passé de 10,7 en 1987 à 19,4 en 2021.

Voici le texte de 67 mots et 14 signes de ponctuation que les professeurs ont dicté à leurs CM2 peu de temps après la rentrée scolaire :

Et voici les résultats par domaine de maîtrise de la langue.

L’orthographe

Cette compétence semble poser des problèmes croissants aux élèves. Les mots du quotidien comme « maison », « papa » ou « maman », ainsi que les articles définis ou les pronoms personnels ne présentent pas de réelle difficulté. En revanche, seuls 50 % des élèves orthographient correctement les mots « peut-être » et « aussitôt ».

La conjugaison

Une bonne maîtrise de la conjugaison est indispensable pour s’exprimer correctement, aussi bien à l’oral qu’à l’écrit. Les difficultés rencontrées par les élèves dans ce domaine sont nombreuses : les temps du passé (passé simple, passé composé et imparfait) sont souvent mal maîtrisés, tout comme les accords du participe passé : « perdus », « retrouvé » et « vus » ont ainsi très souvent été mal accordés.

La grammaire

Perçue comme ardue et rébarbative par les élèves, la dictée pointe la non-assimilation des règles grammaticales par les élèves. Moins de la moitié des élèves de CM2 maîtrisent les règles de base de la grammaire. Comprendre les différentes parties du discours, la construction des phrases complexes, l’accord sujet-verbe, toutes ces compétences semblent faire défaut à une grande partie des élèves.

Évaluations de tous les niveaux de primaire en 2024

En 2024, pour la première fois, tous les élèves du CP au CM2 ont été évalués en français et en mathématiques. Si les résultats en mathématiques ont montré des améliorations, ceux en français ont révélé des stagnations, voire des régressions sur certains points essentiels.

Ces évaluations nationales ont mesuré plusieurs compétences essentielles à chaque niveau :

• En CP, l’accent a été mis sur la reconnaissance des lettres, la conscience phonologique, la lecture de mots simples et la compréhension de phrases courtes. Par exemple, les élèves devaient reconnaître des syllabes dans un mot, associer une image à un mot.
• En CE1, les élèves ont été évalués sur leur capacité à lire un texte court et à répondre à des questions de compréhension explicite et implicite.
• En CM1 et CM2, les épreuves portaient sur la compréhension de courts textes narratifs et informatifs, l’enrichissement du vocabulaire, la maîtrise de la grammaire et de l’orthographe.

Par ailleurs, au collège, les évaluations en sixième ont montré qu’un nombre croissant d’élèves peine à structurer une rédaction et à utiliser un vocabulaire varié. L’analyse syntaxique, la conjugaison et la production d’écrit argumentatif restent des points particulièrement faibles.

Quelles causes peuvent expliquer la baisse du niveau des élèves en français ?

Ces dernières années, le niveau a baissé, et même si l’on constate un léger soubresaut, les élèves ne sont plus à la hauteur des décennies précédentes. Les raisons de cette baisse de niveau en français ne sont pas encore comprises scientifiquement : temps passé devant les écrans, moins de lecture à la maison, moins d’heures de français par semaine en primaire ? Il n’en reste pas moins que le français repose sur trois piliers fondamentaux : l’orthographe, la conjugaison et la grammaire.

Des causes à cette évolution du niveau scolaire en français

Les raisons de cette baisse du niveau en français sont multiples. Voici les facteurs les plus souvent évoqués, mais pas forcément tous scientifiquement prouvés.

1. L’impact du numérique

L’omniprésence des écrans et la consommation rapide d’informations réduiraient la capacité des élèves à lire et à comprendre des textes longs. De plus en plus d’actions de sensibilisation et de prévention sont proposées aux enfants dans le cadre scolaire, ainsi qu’à leurs parents.

2. Des méthodes pédagogiques en question

La place accordée à l’apprentissage explicite de la grammaire, de la conjugaison et du vocabulaire a diminué au fil des décennies. Cela pourrait expliquer certaines lacunes.

Par exemple, un élève de 6e avait 6 heures de français à la fin des années 1990. Il n’en a plus que 4,5 heures de nos jours. La diminution du volume horaire consacré à l’enseignement du français est particulièrement frappante dans l’enseignement primaire. Les statistiques sont éloquentes : comparé à 1968, un écolier terminant son CM2 en 2015 avait bénéficié de 432 heures d’enseignement du français en moins.

C’est donc une tendance de fond depuis plusieurs décennies, que le « choc des savoirs » cherche actuellement à résorber. Mais cela prendra du temps.

3. La crise sanitaire

Les confinements en lien avec la crise du covid-19 et l’enseignement à distance ont accentué les écarts de niveau et fragilisé les apprentissages fondamentaux chez les élèves les plus en difficulté.

Comment améliorer le niveau des élèves en français : quelques pistes

Face à ce constat, plusieurs mesures ont déjà été mises en place, sont ou peuvent être envisagées pour renforcer l’apprentissage du français dès le plus jeune âge :

Un retour aux fondamentaux

L’accent est mis sur la lecture et l’écriture dès le CP, avec un suivi plus individualisé pour les élèves en difficulté. Les directives de l’Éducation nationale tendent à redonner une place importante à l’écrit à l’école élémentaire comme au collège, avec notamment le retour à la dictée quotidienne et au par cœur (poésies, scènes de théâtre…).

Le développement du plaisir de lire

Des initiatives visant à promouvoir la lecture plaisir à l’école et en dehors sont encouragées, notamment à travers des dispositifs comme « Un livre pour les vacances » distribué aux élèves de CM2, ou encore le quart d’heure lecture instauré dans certaines écoles élémentaires et certains collèges.

Un accompagnement renforcé

Des dispositifs comme « devoirs faits » au collège et l’accompagnement personnalisé en primaire visent à aider les élèves les plus fragiles.

Une meilleure formation des enseignants

Des efforts sont entrepris pour outiller les enseignants en matière de pédagogie du français et d’accompagnement des élèves en difficulté. L’objectif est de maintenir un degré d’exigence auprès des élèves et de faire en sorte que les enseignants, eux-mêmes, ne baissent pas les bras face au recul net des compétences fondamentales chez leurs élèves en français.

Pour conclure : est-ce que le niveau scolaire baisse en France ?

Les résultats des enquêtes PISA, PIRLS et des évaluations nationales dressent un constat préoccupant sur l’évolution du niveau des élèves en français. Si certaines tendances s’expliquent par des phénomènes globaux, comme l’essor du numérique ou la crise sanitaire, d’autres relèvent de problématiques plus profondes, liées aux inégalités scolaires et aux méthodes pédagogiques.

Face à cette situation, un renforcement des apprentissages fondamentaux et un accompagnement plus poussé des élèves en difficulté apparaissent comme des leviers essentiels pour inverser la tendance et garantir à tous une maîtrise solide de la langue française.

En effet, le français est une matière qui rayonne sur toutes les autres disciplines : une consigne en mathématiques, un document en histoire-géographie, une étude en biologie… Il s’agit d’une clé de travail indispensable pour envisager des études supérieures ou, plus tard, réussir un entretien d’embauche. Si tel n’est pas le cas, les cours particuliers à domicile permettent à tout enfant de partir sur de bonnes bases en français.