Le feed-back positif, un puissant outil d’apprentissage.

Article publié le 21 novembre 2019 (mis à jour le 05 mars 2024) - 0 commentaires
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Habitués aux notes, particulièrement en France, les enfants ont bien souvent la sensation d’être mis dans une case.
Svenia Busson

Svenia Busson

Dirigeante de LearnSpace

Habitués aux notes, particulièrement en France, les enfants ont bien souvent la sensation d’être mis dans une case. D’un côté, les meilleurs de la classe, de l’autre les moyens, et enfin les élèves médiocres. Le feed-back positif – ou growth mindset – est une approche bien différente et d’autant plus efficace et inclusive, visant à changer de logiciel : la progression valorisée plutôt que l’instant T

La théorie : la recherche de Carol Dweck sur le growth mindset

Théorie relativement récente, au regard de l’ensemble des études sur l’éducation, le growth mindset propose une nouvelle façon de faire avancer les élèves sur la voie de l’apprentissage. De quoi s’agit-il concrètement, pourquoi est-ce important ? Et enfin, comment le développer chez les enfants ?

Le growth mindset : le feed-back positif et la progression dans l’apprentissage

Le growth mindset – état d’esprit de croissance – a été développé en 2006 par Carol Dweck, professeur de psychologie sociale à l’université de Stanford. Ce que l’on peut traduire également par feed-back positif a pour but d’accompagner les enfants et étudiants dans un apprentissage continu. Il ne s’agit plus simplement de les noter sur un devoir, mais de déterminer leur progression à chaque exercice. « Tu n’y es pas encore arrivé mais cela va venir », plutôt que « c’est insuffisant, ce n’est pas comme ça que tu vas pouvoir réussir ».

Dans une conférence TED en 2014, vue aujourd’hui par près de 10 millions de personnes, elle explique que les enfants sont parfaitement déterminés à apprendre et à ne pas abandonner devant la difficulté. Ainsi, même un exercice compliqué – d’un niveau supérieur à leur âge – devient un défi à relever. Ils ne pensent pas y parvenir du premier coup mais agissent dans le but d’obtenir assez d’informations pour y arriver par la suite. En l’encourageant dans cet état d’esprit ouvert à la connaissance et à l’apprentissage, l’enfant apprend mieux. Il est en effet dans l’enthousiasme de la découverte, comme un bébé dans ses phases d’apprentissage sans jugement.

Se sentir dévalorisé à l’école peut éventuellement donner du courage à un enfant pour ensuite prouver le contraire à l’âge adulte, mais cela reste une exception. De la même façon, dire à un enfant qu’il est intelligent par nature ne l’encourage pas à aller plus loin dans l’apprentissage, ou seulement en surface.

Le growth mindset se place ainsi en opposition au fixed mindset, un état d’esprit fixe sans envie de développement. Lorsque le growth mindset fait dire à un individu que ses échecs sont des opportunités pour apprendre et avancer, le fixed mindset lui fait dire que ses échecs sont la preuve des limites de ses capacités. Ou bien encore que son intelligence est prédéterminée et que cela ne peut pas évoluer de manière positive. Cet état d’esprit est avant tout développé par le système scolaire, le déterminisme social, et par un manque d’encouragement global à l’école et à la maison.

Au contraire, le growth mindset est une méthode de résilience qui prouve combien le feed-back positif sur la marge de progression amène les enfants à s’investir et à avancer. Et cela, quel que soit leur milieu social et intellectuel.

Comment développer le growth mindset chez les enfants ?

Carol Dweck affirme ainsi que l’apprentissage continu est la seule réussite qui vaille pour tous pour avancer dans la vie. Dire à un enfant qu’il n’a pas encore réussi mais que cela viendra s’avère, pour le cerveau, beaucoup plus efficace que des notes arrêtées.

Il faut néanmoins faire une distinction entre le growth mindset et la psychologie de l’enfant d’une manière générale. En effet, ce feed-back positif, même s’il contribue à avancer dans l’apprentissage, n’est pas une méthode de bien-être. C’est d’ailleurs à tort que des entreprises s’en emparent dans le cadre de leurs techniques de management et de bien-être au travail. Le growth mindset doit en effet être vu non comme un process de productivité, mais comme un élément fondateur de l’apprentissage des enfants et des adultes.

Développer le feed-back positif chez les enfants peut donc s’intégrer aux méthodes pédagogiques à l’école et à la maison. Le cerveau d’un enfant est en pleine transformation et il est malléable à l’envie. Il est donc toujours possible de changer son biais pour qu’il prenne une nouvelle route, beaucoup plus profitable. Pour Carol Dweck, cette nouvelle manière de penser l’éducation peut se résumer à une expression : « pas encore », sous-entendu « bientôt ». C’est grâce à ces termes que l’enfant comprend qu’il est en progression et qu’il aura les connaissances et la pratique dans peu de temps, en continuant à apprendre et à essayer.

Ainsi, l’enfant va développer une pratique différente et ne plus être abattu ou découragé après un échec. De cette façon, avec le growth mindset :

    • L’enfant apprend de ses échecs,

 

    • Il persévère,

 

    • Il progresse,

 

    • Il se lance des défis pour aller plus loin.

 

 

Là où le fixed mindset revient à dire que :

 

    • L’échec n’existe pas pour moi – ou bien il est pour les perdants,

 

    • Le talent est inné : on naît intelligent / talentueux ou non.

 

Pour que le feed-back soit constructif, votre manière d’aborder la journée de votre enfant doit se faire sur des questions ouvertes. Certes, il est important de savoir s’il a passé ou non une bonne journée, mais le reste doit entraîner tous types de réponses et pas seulement « oui » ou « non ».

Ainsi, demandez régulièrement à votre enfant ce qu’il a fait de nouveau ou de plus difficile dans la journée. Ou bien encore ce que lui ont appris ses erreurs sur un exercice. À l’inverse, ne le comparez pas à ses camarades de classe. Chacun a une marge de progression, peu importe où les autres en sont.

Autrement dit, il ne s’agit pas de se focaliser sur un échec, une mauvaise note, mais de déterminer la progression effectuée et les nouveaux défis à relever. La vie scolaire et extra-scolaire devient alors plus épanouissante, plus enthousiasmante car la nouveauté prend un visage positif. Et non plus celui de la crainte de l’échec.

La pratique : exemples de mise en place du feed-back positif à l’école

Les pays scandinaves sont particulièrement conscients de ces aspects éducatifs. Précurseurs du feed-back positif, la Finlande et le Danemark développent notamment deux méthodes allant dans ce sens. Et même encore au-delà, en offrant aux enfants un espace éducatif qui les valorise et les rassemble.

Mightifier en Finlande

Mightifier est une méthode éducative d’un nouveau genre créée par Mervi Pänkäläinen, venue du monde de l’entreprise. Consciente et inquiète des méthodes de management qui rabaissent au lieu de valoriser les compétences professionnelles et personnelles, elle a conçu ce projet en collaboration avec des spécialistes de l’éducation.

L’ambition de ce programme, destiné à la fois aux écoles et à d’autres organisations, est d’apporter au cœur du groupe une valorisation globale des capacités et des progressions. Ainsi, les élèves travaillent à travers une application pour se donner mutuellement des feed-back fondés sur des questions positives telles que : « Quelle a été la progression de ton camarade sur cet exercice ? » Aidés en cela par des personnages fictifs et amusants, les élèves développent une véritable solidarité. Cela a pour effet d’augmenter les capacités des enfants à créer et à entretenir des relations avec les autres. De cette façon, l’isolement que certains peuvent connaître diminue, tout comme le harcèlement scolaire.

Les cours d’empathie au Danemark

Au Danemark, les enfants de 6 à 16 ans doivent assister toutes les semaines à une heure de cours sur l’empathie. Il s’agit ainsi de se mettre à la place des autres, de les comprendre, afin de mieux appréhender leur comportement. Cela n’a donc rien à voir avec la compassion. Ici, les enfants danois travaillent sur la parole, le vivre ensemble et la compréhension des enjeux de chacun, dans sa vie de famille, en dehors et à l’intérieur de l’école. Ils explorent ainsi le caractère émotionnel propre à un individu, en utilisant leur langage et des cartes qui leur permettent de s’exprimer plus facilement.

Grâce à cela, et à un ensemble d’autres particularités du système éducatif au Danemark (les notes n’arrivent qu’à partir de l’équivalent de la 4e par exemple), la solidarité prend le pas sur la compétition.

Bien sûr, que cette philosophie soit appliquée ou non à la maison ne présage en rien de l’avenir de ces enfants. Mais elle leur donne une force, celle de la compréhension d’eux-mêmes, des autres et de leurs capacités à avancer dans la vie, avec les mêmes chances d’apprentissage et d’élévation dans la société.

Le growth mindset et le feed-back positif ouvrent le champ des possibles pour les enfants et les étudiants. Comprendre que tout est réalisable, que l’échec est une chance pour avancer et non plus la fin d’une ambition, peut suffire à décupler l’envie d’apprendre et, surtout, à ne plus avoir peur de faire des découvertes et d’être à l’écoute des autres. Le growth mindset, dans sa pratique au quotidien, est la preuve qu’il est possible de dépasser les injonctions de la société et de tracer sa voie de la connaissance en continu, en se relevant toujours.

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