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Savoir quand doubler les consonnes, pas si évident

Article publié le 27 novembre 2025 (mis à jour le 27 novembre 2025) - par Marie Tran
7 minutes

Le doublement des consonnes est un des sujets provoquant des erreurs fréquentes en français. Beaucoup d’enfants (et d’adultes) hésitent entre une ou deux consonnes dans des mots très courants. Faut-il écrire « appeler » ou « apeler » ? « Jeter » ou « jetter » ? Cette incertitude est compréhensible : doubler des consonnes obéit à une logique qui mêle de nombreux éléments ne relevant généralement pas d’une simple fantaisie orthographique. C’est d’ailleurs ce qui est souvent abordé par les professeurs de français. L’objectif fondamental de cet article est de vous permettre de comprendre cette logique, afin d’acquérir des réflexes fiables et durables d’écriture.

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Cahier d'école avec texte "Le bateau est près de quitter le port" - exercice orthographe avec Acadomia

Pourquoi doubler certaines consonnes ? Ses trois piliers

Avant d’entrer dans les cas particuliers, déconstruisons un mythe. Le doublement d’une consonne n’a jamais pour effet de doubler la force de sa prononciation ou de donner une accentuation particulière, comme ce peut être le cas dans d’autres langues (italien, par exemple). Si une consonne est doublée, c’est pour d’autres raisons, que l’on peut regrouper en trois grands ensembles.

1. La préservation d’un son de voyelle (contrainte phonétique)

La consonne double est un artifice graphique qui peut empêcher la voyelle précédente de changer de prononciation. En l’absence de doublement (consonne simple), la voyelle qui précède peut être fermée ou nasalisée. La consonne double, au contraire, agit comme une barrière, garantissant que la voyelle conserve un son ouvert ou clair. C’est l’aspect le plus « vivant » et le plus directement lié à la conjugaison et à la dérivation de certains mots.

Ce phénomène est particulièrement visible avec la voyelle « e » devant -l, -n et -t : le « e » se prononce alors [ɛ] (è). Il concerne également le -s pour maintenir le son [s]/ entre deux voyelles.

2. La logique morphologique et la cohérence lexicale (contrainte structurelle)

Il s’agit ici de l’influence du préfixe ou du radical. Certaines familles de mots imposent un doublement pour maintenir une cohérence visuelle et sémantique entre les membres de la famille. Par ailleurs, lorsque l’on ajoute un préfixe, un phénomène d’assimilation peut se produire, aboutissant au doublement de la consonne. Cette assimilation est l’illustration parfaite du principe d’économie linguistique : plutôt que de prononcer distinctement deux consonnes identiques, le locuteur va fusionner les sons, et l’orthographe transcrit cette fusion par le doublement. Ainsi, au lieu de dire in-réel, on dira irréel.

3. L’héritage étymologique (contrainte historique)

La dernière raison, plus discrète mais très importante, est l’héritage que nous offre l’étymologie des mots, c’est-à-dire la façon dont le mot a évolué depuis le latin ou d’autres langues d’origine. Pour certains mots, il n’existe pas de règle active. L’écriture avec une double consonne est simplement une trace de l’histoire du mot. Par exemple, le mot « colle » vient du grec « kolla ». Ce doublement est souvent hérité des doublements consonantiques déjà présents dans la langue d’origine et conservés en français.

Comprendre ces trois axes permet d’avoir une vision globale, et d’anticiper un raisonnement face à un mot inconnu pour en déduire son orthographe.

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Les consonnes les plus fréquemment doublées

L, M, N, R, S, T sont les consonnes les plus susceptibles d’être doublées en français. Cela ne signifie pas qu’elles le sont toujours, mais qu’elles apparaissent régulièrement dans les mots concernés par les dérivations, les assimilations ou les héritages.

Connaître ces consonnes « sensibles » aide les élèves à être attentifs lorsqu’ils écrivent un mot nouveau. Une vigilance particulière est de mise face à ces six lettres.

Doubler une consonne pour maintenir l’ouverture de la voyelle (phonétique)

C’est probablement l’aspect le plus concret pour les élèves, notamment lorsqu’ils étudient la conjugaison ou la féminisation de certains mots au cycle 3 et au collège.

Le doublement du -s- : éviter le son [z]

Le doublement de la consonne -s- est l’un des cas les plus réguliers et les plus importants du point de vue phonétique. En français, la lettre -s- placée entre deux voyelles prend la valeur d’une consonne sonore, soit le son [z], comme dans « poser ».

Pour conserver le son sourd [s] (comme dans « sac ») entre deux voyelles, l’orthographe impose le doublement du -s- dans l’immense majorité des cas.

Exemples : poisson (à ne pas confondre avec poison), mousse, pousser, etc.

Quelques exceptions (souvent inévitables dans notre langue) : dans parasol, tournesol ou encore vraisemblable, il n’y a qu’un seul -s- entre deux voyelles. Ce -s- se prononce tout de même [s] et pas [z].

Les verbes en -eler et -eter : un cas emblématique

La difficulté de ces verbes (comme appeler ou jeter) vient de la prononciation du « e » qui précède le « l » ou le « t ».

En français, le « e » doit souvent prendre le son ouvert, comme dans le mot père [ɛ], lorsqu’il est conjugué (exemples : je jette, j’appelle).

Le mécanisme du doublement

Si le « e » était suivi d’une seule consonne, il risquerait de devenir un son fermé ou muet (comme dans le mot je [ə]), ce qui serait incorrect dans ces formes verbales.

Pour garantir que le « e » se prononce ouvert [ɛ], l’orthographe utilise le doublement de la consonne (le -l- ou le -t-).

Exemple : en écrivant « je jette » (avec -tt-), le doublement assure que le « e » est prononcé [ɛ]. Si l’on écrivait « je jete » (un seul -t-), le son [ɛ] ne serait pas garanti.

Les exceptions

Le français offre une autre solution pour obtenir ce son ouvert [ɛ] sans doubler la consonne : l’utilisation de l’accent grave. Ainsi, certains verbes comme acheter ou geler ne doublent jamais leur consonne. Ils utilisent l’accent grave à la place. On écrit donc « j’achète » (et non pas « j’achette ») ou « ça gèle » (et pas « ça gelle »).

Le doublement de lettre dans la dérivation (mise au féminin, adverbe)

Le doublement se produit souvent lors du passage de la forme masculine à la forme féminine d’un adjectif, ou lors de la création d’un adverbe à partir de l’adjectif. Il permet de marquer l’ouverture de la syllabe ou de prononcer une consonne finale qui était muette au masculin.

Exemples :

  • bel (masc.) → belle (fém.)
  • gros (masc.) → grosse (fém.)
  • gentil (masc.) → gentille (fém.)
  • naturel → naturellement (adv.)
  • sensuel → sensuellement (adv.)

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Doublement d’une consonne au début d’un mot : le rôle des préfixes (morphologie)

Une règle d’une très grande régularité concerne l’adjonction de préfixes. C’est l’un des rares cas où le doublement est quasi-systématique et donc prédictible, ce qui en fait un excellent outil d’aide à la mémorisation pour les élèves.

Nous allons voir ce qu’il en est de in-, ad- et con-. En effet, en fonction de l’évolution du mot : la consonne finale du préfixe s’est transformée pour devenir identique à la consonne initiale du radical.

In-

Ce préfixe exprime la négation (incapable) ou l’idée d’intérieur (injecter). Devant les consonnes l, m, r, il s’assimile complètement pour faciliter la prononciation des mots. Cette évolution s’est faite au fil du temps.

Exemples :

  • in + nombrable = innombrable
  • in + logique = illogique (assimilation)
  • in + mobile = immobile (assimilation)
  • in + réel = irréel (assimilation)

Devant p et b, le n se transforme en m par un autre phénomène d’assimilation (le n est labialisé) : in + possible = impossible. Ce n’est pas un doublement, mais une transformation de la nasale.

Ad-

Il signifie vers ou à et s’assimile en doublant la consonne du radical devant f, g, n, p, r, s, t.

Exemples :

  • ad + faire = affaire (assimilation)
  • ad + gravir = aggraver (assimilation)
  • ad + noter = annoter (assimilation)
  • ad + sumere (latin) = assumer (assimilation)
  • ad + terrir = atterrir (assimilation)

Con-

Le préfixe con- signifie avec ou ensemble. En s’assimilant, il double la consonne du radical devant l et r.

Exemples :

  • con + latéral = collatéral
  • con + rompre = corrompre
  • Devant p et b, le n se transforme en m (labialisation) : con + battre = combattre.

L’héritage historique

Certains mots contiennent une consonne double, non pas parce qu’une règle moderne l’exige, mais tout simplement parce que le mot a évolué ainsi au fil du temps. Il s’agit d’un héritage de l’histoire du français.

La langue change, mais l’orthographe garde parfois des traces de formes anciennes.

Quelques exemples de mots concernés :

  • terre
  • flamme
  • femme
  • homme
  • somme
  • verre
  • serrure
  • appétit
  • embarras
  • fourrure
  • grille
  • appareil

Comment savoir si l’on doit doubler une consonne dans un mot ?

Doubler une consonne peut sembler compliqué, mais il existe une méthode fiable reposant sur quelques questions simples. En les appliquant systématiquement, vous pouvez déterminer dans la grande majorité des cas si une consonne doit être doublée ou non. Cette démarche évite l’apprentissage par cœur et s’appuie sur des mécanismes logiques de la langue.

Réfléchir à la prononciation

La première question à se poser concerne la prononciation de la voyelle précédente. Certaines voyelles se prononcent différemment selon qu’elles sont suivies d’une consonne simple ou double. Lorsque la langue cherche à maintenir une voyelle ouverte, elle utilise la consonne double. C’est le cas dans « je jette » ou « maisonnette ». Sans doublement, la voyelle changerait de son.

Identifier la famille du mot

La deuxième question porte sur la famille du mot. Si un mot de base contient déjà une consonne double, ses dérivés la conservent en général. Appel, appeler, rappel partagent la même structure. De même pour terre, terrestre ou terrien. À l’inverse, si la famille n’utilise pas de doublement, il n’y a pas de raison d’en ajouter : imaginer, image, imagination restent cohérents.

Voir s’il y a un préfixe

La troisième question concerne la présence d’un préfixe qui provoque une assimilation. Lorsque le préfixe se termine par la même consonne que celle qui commence le radical, la consonne double systématiquement. Cela explique illégal, irréel, immobile ou addition. Cette règle est parfaitement régulière.

Et les autres

La dernière question, plus simple, s’intéresse aux mots dont l’orthographe est héritée de l’histoire. Terre, homme, colle, flamme ou adresse n’obéissent pas à une règle active : la langue les a fixés ainsi, et leurs dérivés en conservent souvent la structure (mais pas toujours).

Après la lecture, 2 entraînements

Pour chaque phrase des exercices suivants, identifiez le ou les mots manquants en choisissant la bonne proposition (consonne simple ou double).

Exercice 1 – Niveau CE1-CE2

  1. Il appelle sa cousine pour la (fête / fette).
  2. Elle est (bel / belle).
  3. La (difficulté / dificulté) n’est pas grande.
  4. Vide donc cette (poubelle / poubele) vide.
  5. Son (attitude / atitude) est gênante.
  6. Ses bottes sont pleines de (tère / terre).
  7. Le (poison / poisson) acheté au marché est bien frais.
  8. L'(home / homme) est resté calme.
  9. Elle porte des (couettes / couetes).
  10. La maison est (nette / nete) après le nettoyage.

Correction : 1. fête ; 2. belle ; 3. difficulté ; 4. poubelle ; 5. attitude ; 6. terre ; 7. poisson ; 8. homme ; 9. couettes ; 10. nette

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Exercice 2 – Niveau CM1-CM2

  1. Cette décision est (illégale / ilégale) selon le règlement.
  2. Il est resté (imobile / immobile) pendant plusieurs minutes.
  3. Elle a su faire (ilusion / illusion).
  4. Leur comportement était (iréprochable / irréprochable) ce jour-là.
  5. Ce document doit être (anoté / annoté) avant signature.
  6. Ils ont trouvé des avantages à mieux (communique / comuniquer).
  7. Apprendre une langue étrangère lui semble (irréaliste / iréaliste).
  8. Je remarque que tu as changé d'(addresse / adresse).
  9. L’accalmie a permis à la situation de ne pas (aggraver / agraver).
  10. Elle (connaît / conaît) bien la conjugaison du verbe être.

Correction : 1. illégale ; 2. immobile ; 3. illusion ; 4. irréprochable ; 5. annoté ; 6. communiquer ; 7. irréaliste ; 8. adresse ; 9. aggraver ; 10. connaît

À retenir

Pour savoir si vous devez doubler une consonne, Acadomia vous conseille d’examiner le mot attentivement :

  1. La voyelle précédant le doublement serait-elle prononcée autrement avec une consonne simple ?
  2. Le mot appartient-il à une famille où la consonne est déjà doublée ?
  3. Y a-t-il un préfixe ?
  4. Le mot est-il connu pour son orthographe héritée ?

En observant ces éléments, vous pourrez identifier plus facilement les situations où une consonne doit être doublée et ainsi améliorer votre orthographe sans problème.

Marie Tran
Auteur de l’article : Marie Tran
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p>Dans les diminutifs formés avec -ette, la consonne qui précède le suffixe est double pour conserver la prononciation : fille → fillette, poule → poulette, maison → maisonnette. À noter que tous ces noms sont de genre féminin.