Existe-t-il différentes formes d’intelligence ?

Article publié le 04 mars 2021 (mis à jour le 16 novembre 2023) - 0 commentaires
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Dès lors que l’on s’intéresse à la notion d’intelligence, de nombreuses (et parfois d’éternelles) questions surgissent : qu’est-ce que cela signifie « être intelligent » ? Sommes-nous tous intelligents de la même façon ? Existe-il différentes formes d’intelligences et peut-on toutes les développer ? 
Aurélie Poulin

Aurélie Poulin

Responsable de l’orientation et des solutions parascolaires chez Acadomia

Dès lors que l’on s’intéresse à la notion d’intelligence, de nombreuses (et parfois d’éternelles) questions surgissent : qu’est-ce que cela signifie « être intelligent » ? Sommes-nous tous intelligents de la même façon ? Existe-il différentes formes d’intelligences et peut-on toutes les développer ?

Commençons par indiquer ce que nous entendons ici par « intelligence », en en proposant une définition générale : l’intelligence est un ensemble de processus qui nous permet de comprendre, d’apprendre et de nous adapter à des situations nouvelles.

Si l’on s’intéresse maintenant de plus près aux théories permettant de conceptualiser et d’évaluer l’intelligence, on constate qu’elles sont encore aujourd’hui multiples, foisonnantes et controversées.

Nous connaissons tous le terme de « quotient intellectuel » : le fameux « QI », évalué au moyen de tests psychométriques, rend compte de l’intelligence d’un individu par comparaison à sa classe d’âge. Il permet encore aujourd’hui d’identifier les enfants rencontrant des difficultés d’apprentissage ou ceux manifestant un haut potentiel intellectuel. Créée au début du XXe siècle pour dépister et aider les élèves en difficulté, cette notion de « QI général » a fait l’objet depuis de nombreuses critiques.

Le modèle de Cattell-Horn-Carroll (ou CHC), développé progressivement à partir du milieu des années 40 et abouti dans les années 1990, est plus complexe : il décrit l’intelligence comme un ensemble d’aptitudes cognitives parmi lesquelles l’attention (capacité de raisonnement fluide, mémoire à court terme), les perceptions (visuelles, auditive etc.), les connaissances (compréhension, lecture, écriture) et la vitesse de traitement des informations. Ce modèle est aujourd’hui dominant car le plus reconnu dans le champ de la recherche en psychologie.

 

L’évaluation générale de l’intelligence est souvent critiquée pour sa valorisation de certains aspects de l’intelligence, mis en avant par les enseignements scolaires, comme les aptitudes logico-mathématiques et langagières, au détriment d’autres aptitudes, artistiques ou sociales par exemple ; en effet, si celles-ci sont enseignées de manière moins explicite, elles sont tout aussi utiles à l’adaptation et à l’épanouissement au quotidien.

À la fin des années 1980, le chercheur américain Howard Gardner a proposé une théorie des intelligences multiples, dans laquelle il distingue 8 types d’intelligences, présentés dans le schéma ci-dessous :

D’après cette théorie, chacun d’entre nous possède naturellement ces 8 types d’intelligence de manière plus ou moins marquée, mais nous pouvons développer chaque intelligence tout au long de notre vie. Il n’existerait pas de hiérarchie entre ces intelligences car toutes sont utiles, la réalisation d’une tâche faisant toujours appel à plusieurs types d’intelligence : par exemple, un chef d’orchestre possède à la fois une bonne intelligence musicale mais également une bonne intelligence interpersonnelle afin de faire jouer ensemble les membres de l’orchestre.

Dès leur publication, les travaux de Gardner ont rencontré un vif succès, particulièrement dans le milieu scolaire : d’un point de vue pédagogique, cette théorie offrait de belles perspectives notamment pour l’accompagnement des enfants en difficulté scolaire et souffrant d’une faible croyance en leurs capacités à apprendre et à réussir. En effet, un enfant peinant à développer les formes d’intelligences favorisées par l’école (linguistique et logico-mathématique) pouvait être encouragé et renforcé sur d’autres types d’intelligences, et ainsi parvenir à un développement optimal en lien avec ses propres capacités.

Plusieurs auteurs ont, à la suite d’Howard Gardner, développé d’autres concepts d’intelligence : on peut citer le quotient émotionnel, popularisé par Goleman en 1995, qui regroupe les capacités à percevoir et gérer nos émotions comme celles d’autrui, et qui serait un très bon indicateur de réussite et d’intégration sociale.

Toutefois, malgré l’enthousiasme soulevé par ces théories et la mise en place de programmes pédagogiques fondés sur leurs principes, elles ne sont pas parvenues à véritablement faire leurs preuves du point de vue de la pratique et de la réussite effective des participants.  Par ailleurs, certaines de ces intelligences se rapprochent très largement de ce qu’on appelle désormais « les soft-skills », ces compétences transversales qui comptent parmi elles la coopération, la créativité ou encore la capacité à gérer ses émotions, compétences de plus en plus valorisées sur le marché du travail et dans les enseignements scolaires.

Malgré les écueils rencontrés par  ces conceptions, leur but premier, qui  était donc de contrer les approches classiques de l’intelligence très centrées sur les compétences verbales et logico-mathématiques, reste légitime : valoriser d’autres domaines de réussite, dans lesquels peuvent exceller les jeunes qui ont du mal à s’adapter au système scolaire,  faire en sorte que chacun s’épanouisse en développant ses compétences et en cultivant ses talents est bien évidemment une démarche plus que louable.

Sources :

– Que dit la science à propos des intelligences multiples ? Larivée, S. et Sénéchal, C. (2012), Revue Québécoise de Psychologie, 33(1), 23-45.  https://papyrus.bib.umontreal.ca/xmlui/handle/1866/14080

– L’intelligence émotionnelles, Goleman, D. (2014). J’ai lu, ed.

– John B. Carroll, Human Cognitive Abilities : A Survey of Factor-Analytic Studies, Cambridge University Press, 29 janvier 1993,

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